Les énergies renouvelables (solaire, éolien, hydraulique, biomasse, géothermie, …) sont considérées comme des sources inépuisables et respectueuses de l’environnement, militant ainsi en faveur de la lutte contre le changement climatique. Elles constituent un complément aux énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon…) permettant une diversification de l’offre d’énergie.
Quelle est la situation actuelle de ces énergies dans le monde ? Quels sont les enjeux et les perspectives de ce secteur en Tunisie ? Quelle stratégie adoptée pour les développer de façon à répondre aux besoins sans cesse croissants de la demande énergétique du pays ? Au plan mondial, les énergies renouvelables représentent aujourd’hui près de 20% de la consommation énergétique finale dont les ¾ sont issues de la biomasse (le bois à usage domestique en particulier). En réalité, 8% seulement relèvent de l’énergie dite « moderne ».
Le développement de ces énergies, dépend dans une large mesure de leur compétitivité par rapport aux énergies conventionnelles, compte tenu de leur coût relativement assez élevé.
Cependant, certaines filières comme l’éolien, développé dans des sites bien ventés, sont déjà compétitives essentiellement dans les pays pratiquant la vérité des prix pour les énergies conventionnelles. En fait, le manque de compétitivité des renouvelables est surtout rencontré dans les pays qui subventionnent les énergies issues des hydrocarbures.
Leur développement nécessite donc une volonté politique pour améliorer le mix énergétique et promouvoir de nouvelles sources d’énergie, à l’image des pays surtout européens qui ont mis en place toute une politique favorisant l’accroissement de la contribution des renouvelables dans le temps avec des objectifs bien clairs.
Par ailleurs, les enjeux du changement climatique et les préoccupations environnementales constituent un cadre favorable au développement des énergies renouvelables considérées comme des énergies propres (sans émission de gaz à effet de serre). Les choix faits par ces pays s’inscrivent dans une double perspective de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de substitution du nucléaire.
Dans ce contexte, on assiste à un essor important de l’énergie éolienne dans des pays comme l’Allemagne, l’Espagne et le Danemark, et de l’utilisation de la biomasse dans un grand nombre de pays dont l’Allemagne qui figure au premier rang. Selon les experts, les énergies renouvelables constituent un véritable moteur d’investissement, de croissance et d’emplois.
La plus grande contribution de ces énergies réside dans la production de l’électricité avec connexion au réseau comme l’hydraulique, le grand éolien et les centrales solaires thermiques et photovoltaïques.
Orientations énergétiques de la Tunisie Pour le cas de la Tunisie, qui dispose d’un potentiel important d’énergies renouvelables, «notre pays s’est engagé depuis quelques années dans une démarche de promotion de ces sources d’énergie, et ce, à travers la mise en place depuis le milieu des années 80 du cadre institutionnel, avec la création de l’Agence nationale pour la maîtrise de l’énergie (Anme) et du cadre réglementaire et incitatif qui a évolué dans le temps», indique Ezzeddine Khalfallah, consultant international en énergie, ajoutant que «cette évolution s’est traduite par la promulgation de la loi de 2004 relative à la maîtrise de l’énergie et par la mise en place d’un Fonds national pour la maîtrise de l’énergie (Fnme) destiné à accorder des aides aux projets d’énergies renouvelables et d’efficacité énergétique.
Ce fonds a permis d’allouer des subventions à différents programmes, notamment le Prosol Thermique (chauffe-eau solaires) et le Prosol Electrique (toits solaires photovoltaïque)». En plus et avec la mise en place de mécanismes de financement appropriés, ces programmes ont pu créer une dynamique industrielle générant des milliers d’emplois (fabricants, importateurs, installateurs, etc.), souligne notre consultant international dans le domaine de l’énergie.
En effet, et grâce à ce mécanisme basé sur une combinaison entre une subvention à l’investissement et un crédit bancaire remboursable sur la facture d’électricité Steg, les chauffe-eau solaires ont connu en Tunisie un développement spectaculaire avec une évolution passant de 7.000 m2 de capteurs par an en 2004 à plus de 80.000 m2 par an en 2010 avec un cumul qui a dépassé à ce jour les 550.000 m2.
Au niveau de la production centralisée d’électricité par les énergies renouvelables, les seuls projets ont concerné la filière éolienne et ont été réalisés par la Steg avec une capacité totale installée de 245 mégawatts (MW) dont 55 MW à Sidi Daoud et 190 MW dans la région de Bizerte.
La loi de 2009, qui a modifié et complété celle de 2004, prévoit la promotion des énergies renouvelables pour la production indépendante d’électricité avec la possibilité de vente du supplément d’électricité à la Steg dans la limite des 30% de la production totale.
A ce jour, cette loi n’a pas donné lieu à de véritables projets pouvant répondre aux besoins des auto-producteurs. Une production électrique de 30% en 2030 «Actuellement, une nouvelle loi sur la production d’électricité à partir des énergies renouvelables est approuvée par le gouvernement et se trouve en instance de promulgation à l’Assemblée nationale constituante (ANC)», affirme notre expert.
Une fois promulguée et ses textes d’application adoptés, cette loi permettra à tout investisseur public ou privé, ou même en partenariat, de produire et de vendre en partie ou la totalité de l’électricité à la Steg. Cette loi donne aussi la possibilité aux collectivités locales et aux entreprises publiques de produire de l’électricité à partir des énergies renouvelables pour leurs propres besoins de consommation.
Parallèlement à cette nouvelle loi, il a été décidé de transformer le Fnme en un Fonds de transition énergétique «FTE» avec de nouvelles mesures incitatives et des mécanismes de financement plus appropriés, à savoir l’augmentation des ressources du fonds d’une manière significative afin de mieux soutenir les programmes de maîtrise de l’énergie et l’élargissement des modes de son intervention sous plusieurs formes : subvention, création de lignes de crédit, fonds d’investissement et bonification du taux d’intérêt.
Ainsi, avec cette évolution du cadre réglementaire, la Tunisie bénéficiera certainement d’un développement plus important des énergies renouvelables pour atteindre les objectifs ambitieux fixés par le nouveau plan solaire tunisien, à savoir assurer une contribution de ces énergies dans la production électrique de l’ordre de 30% à l’horizon 2030, soit une capacité totale de 3.700 MW pour l’ensemble des filières.
Toutefois, des barrières à cette contribution sont à surmonter, compte tenu d’une part de l’intermittence de ces énergies et de la limite d’absorption du réseau électrique national, d’autre part. Les solutions préconisées pour faire face à la problématique de la limite d’absorption du réseau consistent à réaliser l’interconnexion électrique de la Tunisie avec l’Europe via l’Italie et à renforcer celles existantes avec les deux pays voisins.
Une deuxième solution consiste à réaliser des projets de pompage turbinage de façon à pouvoir gérer le surplus d’électricité en période de creux et le manque d’électricité en période de pointe.
Le développement des énergies renouvelables pourrait ainsi stimuler la croissance tunisienne et conduire à la création de nouveaux secteurs d’activités et de métiers porteurs d’avenir.
Les Tunisiens pourraient avoir accès à une énergie propre et durable, mais également à de nouvelles perspectives d’emplois et une qualité de vie meilleure. Mais il reste à savoir à quel prix ?
Source : La Presse